Suite & Fin de la grande épopée St JOSEPH (par l'auteur Claude AVRIL°
1968 arrivait…fin
Je ne sais plus si c’est en deuxième ou en troisième année à St Jo,
mais je me souviens qu’à une rentrée scolaire de septembre, celle-ci
avait été, on va dire, assez glissante dans l’humour. Comme tout
interne, me voici de nouveau avec des valises en direction des
dortoirs. Cette foi-ci, c’était un dortoir à l’étage en dessous par
rapport à celui de l’année précédente où je devais. Mais voila, ce
n’était pas un lit, c’était une chaise qui m’était attribuée pour mes
nuits ! Le frère surveillant, je ne sais plus quel, me proposa de
m’installer provisoirement à l’infirmerie. A cette époque,
l’infirmerie était installée au dessous des étages des dortoirs, dans
le couloir des frères. On y accédait par l’escalier central. Alors le
soir, le silence était impératif, par contre on pouvait utiliser les
toilettes, chose qui n’était pas autorisée dans les dortoirs. Nous
étions 3 ou 4 élèves, je ne sais plus, à nous retrouver à dormir Ã
l’infirmerie. Ca commençait bien ! Cela dura plusieurs jours jusqu’Ã
ce que je me retrouve dans un dortoir. Ce qui n’avait pas changé,
c’était le bruit de moteur d’un deux roues qui tournait sur la place
devant l’école, on savait que quelques minutes après le passage de ce
deux roues, les lumières allaient être allumées dans le dortoir et la
journée allait commencer.
Un des frères surveillants avait été surnommé « ping-pong ». Il était
jeune. Un soir, quelques têtes chaudes s’étaient amusées à appeler «
ping » d’un côté du dortoir et un autre côté un autre répondait «
pong ». Une fois ça passait, deux fois, tout juste ! A la troisième
fois c’était fini, il avait rallumé les lumières et avait fait relevé
une partie du dortoir. Fatigué, j’étais resté allongé dans mon lit.
Lors d’une nouvelle année scolaire qui commençait, le photographe
local m’avait conseillé de lire une revue scientifique qui s’appelait
« Sciences et Avenir ». D’après lui, j’allais trouver dans cette
revue des sujets que je risquais étudier en classe. Vu que sur le
chemin de la gare Dijon Porte Neuve à St Jo le lundi matin, je
passais devant des marchands de journaux, je m’achetais la dite
revue. Un professeur d’atelier s’en était aperçu et me l’empruntait.
La revue était très intéressante et elle expliquait mieux que la prof
de science.
Travaux en ateliers
Un jour, j’ai entendu un prof d’atelier se lamenter que les bâtiments
étaient vides d’élèves les jeudis après midi. Alors, pour m’éviter de
parcourir des kilomètres à pieds dans Dijon durant les promenades
récréatives des jeudis après midi, j’ai eu l’idée de demander au
prof, au cas ou il y aurait du travail pour moi, de me le faire
savoir. Je devais revenir aux ateliers, le jeudi après le repas de midi.
Là , j’ai retrouvé le frère responsable des ateliers, celui que l’on
surnommait « la grande Duduche », et oui, il était toujours là . Mais
là , j’avais trouvé un homme beaucoup sympathique que l’affreux
bonhomme qui nous foudroie du regard le samedi midi avant de quitter
les ateliers. Effectivement il y avait du travail mais qui n’avait
rien à voir avec l’utilisation des machines outils. Au fond des
ateliers, vers le poste de soudure à l’arc et à l’autogène, il y
avait deux grands bacs en fer avec des morceaux de bois et du sable
noir. Le but était de réaliser un ensemble pour faire une empreinte
pour un moulage de pièce de fonderie. Ayant quelques notions
d’utilisation d’une truelle, j’ai commencé à préparer le sable noir,
puis l’emprunte en bois, puis réaliser l’assemblage. Les travaux ont
durés plusieurs semaines. De temps en temps, un autre élève de la
classe m’accompagnait, si non, j’avais les ateliers pour moi tout
seul avec, de temps en temps la visite d’un prof ou de la grande
Duduche. C’est là que j’ai mis au point le retour de pièces que je
fabriquais en semaine. Oui, un jour, je me suis aperçu qu’après avoir
été notées, nos pièces disparaissaient dans un conteneur installé
derrière les bâtiments, vers les ateliers de mécanique auto. Le prof
ne voulant pas que l’on ramène des pièces dans les familles, j’ai
passé outre et les jeudis en fin d’après midi, avec un tourne vis,
j’allais dans la poubelle récupérer mes pièces pour les démonter et
les mettre dans un endroit à l’abris des regards. Il faut se rappeler
que nous avions un numéro, il me suffisait que je retrouve mes pièces
frappées à mon numéro et le samedi midi, je me proposais pour
ramasser les copeaux et limaille de fer du matin, et, une fois en
dehors des bâtiments, je prenais mes pièces et les mettaient dans mon
bleu de travail. Quelques minutes avant le signal de se mettre en
rang au milieu des ateliers, je roulais mes pièces dans un tissu et
les mettaient dans mes poches de pantalon pour les ramener
discrètement chez mes parents. Mais tout a une fin, et un jeudi après
midi, le montage de fonderie n’était plus là . Il était partit Ã
Beaune. Je me suis vu contraint de reprendre les longues marches des
jeudis après midi.
Néanmoins, j’ai continué d’aller dans la poubelle des ateliers par
l’extérieur des bâtiments et j’ai ramené un presse-papier, une
équerre à chapeau, un porte-crayon, un fil à plomb et encore d’autres
pièces. Ce sont l’équerre et le fil à plomb qui ont eu le plus de
succès au village : les ouvriers de mon père m’avaient demandé de
leur en fabriquer. Cependant, lors que je ramenais les appréciations
du prof d’atelier à la maison, mes parents ne comprenaient pas les
annotations. Pour le professeur, mon travail en atelier n’était pas
excellant, j’avais des efforts à faire, c’était peut être vrai au
début. L’un râlait contre les mauvais résultats alors que l’autre
avait en main la preuve du contraire. Alors qui croire ? C’est un
jour que j’avais ramené une pièce du genre casse noix que la famille
avait enfin compris que le prof était en dessous de la vérité sur mon
travail en atelier. Je passais donc une partie de mes temps de repos
scolaires à fabriquer des pièces dans l’usine de mon père pour les
ouvriers.
En chambre
Plus tard encore à St Jo, après avoir dormi en dortoir, je me suis
retrouvé en chambre de trois lits. Dans la chambre, nous n’étions que
deux. C’est là où j’ai retrouvé Claude Antier, lui aussi, élève de
mécanique générale. Il ne rentrait dans sa famille, à Lons-le-
Saunier, que lors des vacances scolaires. Le reste du temps, il
restait à St Jo. Pour moi, le soir, ce n’était pas facile de dormir
car mon voisin de lit éteignait la lampe de la chambre très tard
malgré les nombreuses demandes d’extinction des lumières du
surveillant. Le matin, il allumait la lampe de la chambre avant
l’appel du surveillent. Mes nuits ont été courtes !
Les mauvaises surprises arrivent
Je ne sais plus comment cela a commencé, mais nous avions visité une
entreprise de fonderie, puis d’accessoires automobiles, etc. Ces
visites nous avaient intéressées et je me souviens que plusieurs
élèves avaient écrit à ces entreprises pour savoir s’il y avait de
l’embauche. Moi aussi j’avais écris : le résulta avait été décevant.
Depuis des mois et des mois, les professeurs nous avaient fait rêver
comme quoi nous aurions un bon métier, une bonne paye, etc, etc. Les
résultats de nos courriers avaient été très loin de nos espérances et
de nos rêves car les entreprises nous répondaient qu’elles étaient au
regret de nous annoncer que ……..On connaît la suite de la phrase !
Les professeurs nous auraient-ils menti depuis tout ce temps ?
Nous étions en automne 1967, des étudiants à Paris commençaient à se
révolter contre leurs dirigeants. Et oui, à eux aussi on avait promis
« monts et merveilles » et en réalité, c’est le chômage qui attendait
ces jeunes à la fin de leur année en faculté. D’autres étudiants dans
d’autres grandes villes avaient compris, eux aussi qu’ils n’auraient
pas de travaille après leurs études. Nous à St Jo, on avait deviné
que notre avenir n’était pas meilleur. Même dans les autres classes
le moral n’y était plus beaucoup. Alors des professeurs avaient osé
nous avouer qu’effectivement, avec ou sans diplôme, beaucoup d’entre
nous aurions du mal à trouver un emploi. Alors toutes ses belles
promesses n’étaient que du vent ?
Par le biais des radios et des télévisions, nous apprenions que des
parents d’élèves avaient compris que leurs « têtes blondes » se
retrouveraient au chaumage, et oui, sur des milliers d’étudiants,
seuls, quelques centaines auraient un emploi. De plus le gouvernement
demandait aux parents que les enfants aillent le plus loin possible
dans les hautes études du genre bac plus je ne sais plus quoi, mais
les patrons étaient réticents car ils ne pourraient pas payer les
jeunes en fonction de leurs niveaux d’études et en plus ils
préféraient avoir des jeunes moins diplômés mais sachant travailler.
Les ouvriers parents des élèves voulaient du changement et voulaient
être écouté. Mais un prof est un prof et il voulait suivre le
programme de l’éducation national. Alors, après les étudiants, ce
sont les ouvriers parents des élèves et d’autres corporations qui se
retrouvèrent dans la rue pour hurler leur mécontentement.
A St Jo, seule la prof de maths et sciences ne voulait rien savoir
sur le soucis qui nous hantait : être chômeur en fin d’étude. Elle
tenait désespérément à nous faire comprendre des cours de maths alors
que nous savions que cela ne nous serviraient à rien dans notre
proche avenir, et vu qu’elle jappait toujours, on en avait assez. Les
délégués de classe, interne et externe, avaient demandé que l’on
fasse faire des lettres par nos parents pour le renvoi de la prof.
Aucun parent n’avait répondu à nos demandes : nous étions seuls dans
le combat. Alors un jour de raz le bol général, on avait fermé nos
cahiers et livres en signe de protestation. Là , la prof avait hurlé
contre nous et nous avait fait un chantage de colle générale pour
toute la classe si on rouvrait pas nos documents. Voyant que personne
ne voulait reprendre le cours, mais qu’en plus, on râlait violemment
contre elle dans une pagaille infernale, elle était allée chercher le
frère surveillent. Avions-nous gagné la bataille ? Pas sûr ! Le frère
était rentré dans la classe, rouge de colère et nous, super excité.
C’est dans cette cacophonie générale qu’on avait tenté d’expliquer au
frère nos préoccupations et nos craintes. Je ne sais plus ce qui
s’est passé, si la sonnette de la fin des cours avait retenti, mais
tout avait été arrêté. Certains externes étaient partis, d’autres
étaient restés avec une poignée d’internes, nous étions un certain
nombre d’élèves en classe à discuter de la manière avec la quelle
nous allions éjecter la prof, c’est alors que le frère était revenu
en classe, plus calme cette foi. On lui avait ré expliqué notre
situation, il avait compris nos craintes mais il nous avait signalé
que la prof nous avait tous collé. Pour nous c’était simple, nous ne
ferions pas la colle et nous allions demander de l’aide aux
professeurs d’atelier pour savoir quels étaient les cours de maths et
de sciences que nous devions apprendre pour nous servir des machines
car l’examen final était pour l’année suivante.
Si je me souviens bien, les professeurs des ateliers mécanique
générale et mécanique automobile nous avaient proposé de voir et
revoir les principales opérations sur papier et ensuite en calcul
mental pour trouver rapidement les vitesses de rotation des machines
et des pièces, les rapports entre les différentes pignons pour les
calculs des avances sur les tours avec la vis mère, les vitesses et
avances sur les fraiseuses, étaux-limeurs, perceuses, etc. Le cours
de math suivant avait commencé par une mise au point avant l’arrivée
de la prof. La prof était arrivée avec le frère. Les délégués de
classe avaient commencé leurs explications sur les cours à suivre
suivant les conseils des professeurs des ateliers pour l’utilisation
des machines outils, mais également dans le domaine électrique,
pneumatique et hydraulique. Si la prof acceptait de nous faire des
cours dans ce sens tout irait bien, néanmoins elle pouvait finir le
cours qui avait été commencé et que peu comprenait et on changerait
complètement de sujet d’étude, si elle refusait, on pouvait se passer
d’elle et on devenait autonome. On prenait un gros risque, car si
elle refusait, qui allait nous faire les cours ? Le frère nous avait
rappelé qu’à la fin d’année nous avions notre examen professionnel Ã
passer, ce n’était pas le moment de faire du zèle, même si certains
étudiants à Paris et dans d’autres villes étaient en guerre contre le
gouvernement, etc, etc. Je ne sais plus de ce qui s’est passé après,
mais la prof était restée et on avait commencé des cours qui étaient
en correspondance avec nos travaux en atelier. On a eu nos 2 heures
de colle. Seule une poignée d’élèves les avaient faites, les 3/ 4 des
autres avaient refusé et leurs noms avaient été inscrits au tableau
de la classe : j’y étais. Les délégués avaient effacé les noms car
ils n’étaient pas d’accord sur la punition. La prof n’avait rien dit.
Le prof de gym avait compris notre état d’excitation et nous faisait
réaliser des mouvements d’échauffement et d’assouplissement
musculaires autres que les éternelles courses et sauts. Nous avions
de l’énergie d’énervement à dépenser.
Apprentissage au tabac
Je ne sais plus si c’était en deuxième ou troisième année, mais un
hiver arrivait et j’allais encore avoir froid. Alors j’ai eu l’idée
de commencer à fumer des cigarettes. Ce n’était pas pour fumer, non,
c’était pour me réchauffer les mains. L’ennui était que, débutant
comme fumeur, les récréations n’étaient pas assez longues pour fumer
une cigarette dans sa totalité. Mes parents m’avaient mis en garde
contre les effets néfastes du tabac et c’est un de leur ami qui
m’avait indiqué un moyen très simple et pratique et moins nocif que
la cigarette pour me réchauffer les mains : fumer la pipe. La pipe ?
Oui ! Pourquoi pas, cela faisait un peu vieux jeu mais je m’en
moquais. On avait le droit le fumer derrière les barrières au fond de
la cour de récréation dans une zone sablée et gravillonnée. Je
bourrais le tabac dans la pipe, j’allumais et je me réchauffais les
mains comme cela. Je n’étais pas le seul à fumer. Par contre chacun
allumait son tabac avant le passage de la barrière, moi même je le
faisais et un surveillant nous guettait du coin de l’œil et on avait
droit à des pages d’écriture à faire comme punition, vu qu’on ne les
faisait pas, il nous collait pour la fin de semaine. Combien j’ai eu
d’heures de colle ? Je n’en sais plus rien, tout ce dont je me
souviens c’est que je n’en ai fait aucune. Le surveillant n’insistait
pas trop car il avait compris que l’on ne baissait plus la tête comme
des coupables. Une fois la cloche ou la sonnerie d’appelle
retentissait (je ne sais plus), je glissais ma pipe dans ma poche et
le tabac était tellement serré que la pipe s’étreignait toute seule
mais restait chaude. A la récréation suivante, je devais nettoyer le
filtre de la pipe avant une nouvelle utilisation.
Coupures de courant provoquées
Je ne sais plus quand, mais nous avions demandé à pouvoir travailler
à deux par table pour pouvoir faire des demandes et avoir des
réponses sur des sujets difficiles, ce qui était interdit en salle
d’étude ou il devait régner le silence. On avait donc demandé à avoir
des tables et bancs dans le couloir avec de l’éclairage. Tout avait
bien fonctionné durant quelques semaines jusqu’à ce que des doigts
enlèvent les ampoules. L’électricien de l’école ayant refusé de les
remplacer, chacun inventa un moyen pour faire revenir dans le
couloir. De mon côté, j’avais bricolé une prise mâle de rallonge
électrique en reliant les deux plots par un fil assez solide pour
résister au cours circuit qui allait suivre dans la prise. Au premier
essai, cela avait fait un bruit sec dans la fiche murale qui était
devenue noire et la prise que j’avais en main avait chauffé en une
fraction de seconde et mes doigts n’avaient pas appréciés la chaleur.
Le fusible avait sauté, j’avais atteint mon but. Aux actions
suivantes, j’avais enfermé la prise de courant dans un mouchoir et
là , je ne sentais plus rien. Ce qui fait l’électricien, un homme
ventru et solide de toute sa hauteur venait plusieurs fois par
semaine dans les couloirs avec une grande échelle en bois pour
remplacer les fusibles grillés. Les fusibles étaient installés sous
le haut plafond du couloir, mais les ampoules n’ont jamais été
remises. On travaillait donc le soir à la lueur des tubes néon qui
pendaient du plafond dans le couloir.
Les cross
J’ai participé à deux courses de cross dans un stade sportif en
dehors de St Jo. A la première course, je me suis perdu dans le
circuit et la deuxième, je suis allé aux toilettes du stade pendant
que les autres courraient. Après avoir pris tout mon temps, j’ai
enlevé mon numéro épinglé sur ma tenue de gym, je suis ressorti en
dehors du stade et je suis revenu à ma place sur les gradins ou
m’attendaient les copains.
La colère gronde dans le pays
J’ai assisté à la colère des gens en ville avec des bandes de jeunes
et d’adultes qui manifestaient dans les rues, et l’angoisse des vieux
à la campagne. Au village, les habitants commençaient à être
inquiet : des camions d’approvisionnement roulaient difficilement,
les prix augmentaient, des transports publics organisaient des
grèves, hommes et femmes âgées étaient dans les jardins potagers du
matin au soir. Les vieux qui avaient survécus à la dernière invasion
Allemande avaient l’habitude aux restrictions. Nous, beaucoup moins !
Décembre 1967
L’hiver commençait à être froid et brûlant à la foi : froid par la
météo, mais chaud d’autre part, car les grèves commençaient à éclater
un peu partout dans le pays. Dans les villes, étudiants, ouvriers et
certains fonctionnaires avaient envahi des bâtiments, d’autres
bloquaient des routes, etc. Vu que l’approvisionnement dans les
entreprises fonctionnait de moins en moins, des patrons d’usines
menaçaient de fermeture. A la campagne, des classes étaient fermées,
un service d’accueil était organisé par ce que l’on appel maintenant
des bénévoles. Quand je partais le lundi matin du village pour aller
à St Jo, personne ne pouvait prévoir si j’allais arriver en gare Ã
Dijon. La même chose pour le samedi midi pour le retour au village.
Je me souviens qu’un samedi un conducteur n’était plus d’accord pour
conduire la loco et au bout de plusieurs heures de négociations,
c’est un autre conducteur qui avait pris sa place. J’étais arrivé Ã
la maison assez tard dans l’après midi. Puis, seuls les trains de
marchandises et les trains ouvriers circulaient, les autres étaient Ã
l’arrêt. Puis, des trains de marchandises ont commencé à avoir des
difficultés pour circuler. Les réserves dans les stations d’essence
diminuaient, le pétrole commençait à manquer. Le pays était en
crise : le printemps 1968 arrivait…….
Certains français avaient cru, en automne 1967, que toute cette
agitation allait être résorbée assez rapidement. Ils avaient donc
réservé leurs congés pour l’été 68. Le gouvernement l’avait-il
compris ? En fin juin 1968, des promesses gouvernementales arrivèrent
pour calmer l’excitation générale et débloquer la situation dans le
pays. C’est ainsi que des français réussirent à partir en vacances en
été, mais au lieu de partir un mois comme prévu, les vacanciers que
j’ai connu ne sont partis qu’au vu de l’acompte payé lors leurs
réservations. Au retour des vacanciers, la crise, plus calme, était
toujours là . J’ai quitté St Jo en juin 68 après l’examen final qui
c’est déroulé dans la tourmente d’un pays en ébullition. A la
campagne, les bouleversements durèrent jusqu’en 1969/70.
Je ne sais plus si c’est en deuxième ou en troisième année à St Jo,
mais je me souviens qu’à une rentrée scolaire de septembre, celle-ci
avait été, on va dire, assez glissante dans l’humour. Comme tout
interne, me voici de nouveau avec des valises en direction des
dortoirs. Cette foi-ci, c’était un dortoir à l’étage en dessous par
rapport à celui de l’année précédente où je devais. Mais voila, ce
n’était pas un lit, c’était une chaise qui m’était attribuée pour mes
nuits ! Le frère surveillant, je ne sais plus quel, me proposa de
m’installer provisoirement à l’infirmerie. A cette époque,
l’infirmerie était installée au dessous des étages des dortoirs, dans
le couloir des frères. On y accédait par l’escalier central. Alors le
soir, le silence était impératif, par contre on pouvait utiliser les
toilettes, chose qui n’était pas autorisée dans les dortoirs. Nous
étions 3 ou 4 élèves, je ne sais plus, à nous retrouver à dormir Ã
l’infirmerie. Ca commençait bien ! Cela dura plusieurs jours jusqu’Ã
ce que je me retrouve dans un dortoir. Ce qui n’avait pas changé,
c’était le bruit de moteur d’un deux roues qui tournait sur la place
devant l’école, on savait que quelques minutes après le passage de ce
deux roues, les lumières allaient être allumées dans le dortoir et la
journée allait commencer.
Un des frères surveillants avait été surnommé « ping-pong ». Il était
jeune. Un soir, quelques têtes chaudes s’étaient amusées à appeler «
ping » d’un côté du dortoir et un autre côté un autre répondait «
pong ». Une fois ça passait, deux fois, tout juste ! A la troisième
fois c’était fini, il avait rallumé les lumières et avait fait relevé
une partie du dortoir. Fatigué, j’étais resté allongé dans mon lit.
Lors d’une nouvelle année scolaire qui commençait, le photographe
local m’avait conseillé de lire une revue scientifique qui s’appelait
« Sciences et Avenir ». D’après lui, j’allais trouver dans cette
revue des sujets que je risquais étudier en classe. Vu que sur le
chemin de la gare Dijon Porte Neuve à St Jo le lundi matin, je
passais devant des marchands de journaux, je m’achetais la dite
revue. Un professeur d’atelier s’en était aperçu et me l’empruntait.
La revue était très intéressante et elle expliquait mieux que la prof
de science.
Travaux en ateliers
Un jour, j’ai entendu un prof d’atelier se lamenter que les bâtiments
étaient vides d’élèves les jeudis après midi. Alors, pour m’éviter de
parcourir des kilomètres à pieds dans Dijon durant les promenades
récréatives des jeudis après midi, j’ai eu l’idée de demander au
prof, au cas ou il y aurait du travail pour moi, de me le faire
savoir. Je devais revenir aux ateliers, le jeudi après le repas de midi.
Là , j’ai retrouvé le frère responsable des ateliers, celui que l’on
surnommait « la grande Duduche », et oui, il était toujours là . Mais
là , j’avais trouvé un homme beaucoup sympathique que l’affreux
bonhomme qui nous foudroie du regard le samedi midi avant de quitter
les ateliers. Effectivement il y avait du travail mais qui n’avait
rien à voir avec l’utilisation des machines outils. Au fond des
ateliers, vers le poste de soudure à l’arc et à l’autogène, il y
avait deux grands bacs en fer avec des morceaux de bois et du sable
noir. Le but était de réaliser un ensemble pour faire une empreinte
pour un moulage de pièce de fonderie. Ayant quelques notions
d’utilisation d’une truelle, j’ai commencé à préparer le sable noir,
puis l’emprunte en bois, puis réaliser l’assemblage. Les travaux ont
durés plusieurs semaines. De temps en temps, un autre élève de la
classe m’accompagnait, si non, j’avais les ateliers pour moi tout
seul avec, de temps en temps la visite d’un prof ou de la grande
Duduche. C’est là que j’ai mis au point le retour de pièces que je
fabriquais en semaine. Oui, un jour, je me suis aperçu qu’après avoir
été notées, nos pièces disparaissaient dans un conteneur installé
derrière les bâtiments, vers les ateliers de mécanique auto. Le prof
ne voulant pas que l’on ramène des pièces dans les familles, j’ai
passé outre et les jeudis en fin d’après midi, avec un tourne vis,
j’allais dans la poubelle récupérer mes pièces pour les démonter et
les mettre dans un endroit à l’abris des regards. Il faut se rappeler
que nous avions un numéro, il me suffisait que je retrouve mes pièces
frappées à mon numéro et le samedi midi, je me proposais pour
ramasser les copeaux et limaille de fer du matin, et, une fois en
dehors des bâtiments, je prenais mes pièces et les mettaient dans mon
bleu de travail. Quelques minutes avant le signal de se mettre en
rang au milieu des ateliers, je roulais mes pièces dans un tissu et
les mettaient dans mes poches de pantalon pour les ramener
discrètement chez mes parents. Mais tout a une fin, et un jeudi après
midi, le montage de fonderie n’était plus là . Il était partit Ã
Beaune. Je me suis vu contraint de reprendre les longues marches des
jeudis après midi.
Néanmoins, j’ai continué d’aller dans la poubelle des ateliers par
l’extérieur des bâtiments et j’ai ramené un presse-papier, une
équerre à chapeau, un porte-crayon, un fil à plomb et encore d’autres
pièces. Ce sont l’équerre et le fil à plomb qui ont eu le plus de
succès au village : les ouvriers de mon père m’avaient demandé de
leur en fabriquer. Cependant, lors que je ramenais les appréciations
du prof d’atelier à la maison, mes parents ne comprenaient pas les
annotations. Pour le professeur, mon travail en atelier n’était pas
excellant, j’avais des efforts à faire, c’était peut être vrai au
début. L’un râlait contre les mauvais résultats alors que l’autre
avait en main la preuve du contraire. Alors qui croire ? C’est un
jour que j’avais ramené une pièce du genre casse noix que la famille
avait enfin compris que le prof était en dessous de la vérité sur mon
travail en atelier. Je passais donc une partie de mes temps de repos
scolaires à fabriquer des pièces dans l’usine de mon père pour les
ouvriers.
En chambre
Plus tard encore à St Jo, après avoir dormi en dortoir, je me suis
retrouvé en chambre de trois lits. Dans la chambre, nous n’étions que
deux. C’est là où j’ai retrouvé Claude Antier, lui aussi, élève de
mécanique générale. Il ne rentrait dans sa famille, à Lons-le-
Saunier, que lors des vacances scolaires. Le reste du temps, il
restait à St Jo. Pour moi, le soir, ce n’était pas facile de dormir
car mon voisin de lit éteignait la lampe de la chambre très tard
malgré les nombreuses demandes d’extinction des lumières du
surveillant. Le matin, il allumait la lampe de la chambre avant
l’appel du surveillent. Mes nuits ont été courtes !
Les mauvaises surprises arrivent
Je ne sais plus comment cela a commencé, mais nous avions visité une
entreprise de fonderie, puis d’accessoires automobiles, etc. Ces
visites nous avaient intéressées et je me souviens que plusieurs
élèves avaient écrit à ces entreprises pour savoir s’il y avait de
l’embauche. Moi aussi j’avais écris : le résulta avait été décevant.
Depuis des mois et des mois, les professeurs nous avaient fait rêver
comme quoi nous aurions un bon métier, une bonne paye, etc, etc. Les
résultats de nos courriers avaient été très loin de nos espérances et
de nos rêves car les entreprises nous répondaient qu’elles étaient au
regret de nous annoncer que ……..On connaît la suite de la phrase !
Les professeurs nous auraient-ils menti depuis tout ce temps ?
Nous étions en automne 1967, des étudiants à Paris commençaient à se
révolter contre leurs dirigeants. Et oui, à eux aussi on avait promis
« monts et merveilles » et en réalité, c’est le chômage qui attendait
ces jeunes à la fin de leur année en faculté. D’autres étudiants dans
d’autres grandes villes avaient compris, eux aussi qu’ils n’auraient
pas de travaille après leurs études. Nous à St Jo, on avait deviné
que notre avenir n’était pas meilleur. Même dans les autres classes
le moral n’y était plus beaucoup. Alors des professeurs avaient osé
nous avouer qu’effectivement, avec ou sans diplôme, beaucoup d’entre
nous aurions du mal à trouver un emploi. Alors toutes ses belles
promesses n’étaient que du vent ?
Par le biais des radios et des télévisions, nous apprenions que des
parents d’élèves avaient compris que leurs « têtes blondes » se
retrouveraient au chaumage, et oui, sur des milliers d’étudiants,
seuls, quelques centaines auraient un emploi. De plus le gouvernement
demandait aux parents que les enfants aillent le plus loin possible
dans les hautes études du genre bac plus je ne sais plus quoi, mais
les patrons étaient réticents car ils ne pourraient pas payer les
jeunes en fonction de leurs niveaux d’études et en plus ils
préféraient avoir des jeunes moins diplômés mais sachant travailler.
Les ouvriers parents des élèves voulaient du changement et voulaient
être écouté. Mais un prof est un prof et il voulait suivre le
programme de l’éducation national. Alors, après les étudiants, ce
sont les ouvriers parents des élèves et d’autres corporations qui se
retrouvèrent dans la rue pour hurler leur mécontentement.
A St Jo, seule la prof de maths et sciences ne voulait rien savoir
sur le soucis qui nous hantait : être chômeur en fin d’étude. Elle
tenait désespérément à nous faire comprendre des cours de maths alors
que nous savions que cela ne nous serviraient à rien dans notre
proche avenir, et vu qu’elle jappait toujours, on en avait assez. Les
délégués de classe, interne et externe, avaient demandé que l’on
fasse faire des lettres par nos parents pour le renvoi de la prof.
Aucun parent n’avait répondu à nos demandes : nous étions seuls dans
le combat. Alors un jour de raz le bol général, on avait fermé nos
cahiers et livres en signe de protestation. Là , la prof avait hurlé
contre nous et nous avait fait un chantage de colle générale pour
toute la classe si on rouvrait pas nos documents. Voyant que personne
ne voulait reprendre le cours, mais qu’en plus, on râlait violemment
contre elle dans une pagaille infernale, elle était allée chercher le
frère surveillent. Avions-nous gagné la bataille ? Pas sûr ! Le frère
était rentré dans la classe, rouge de colère et nous, super excité.
C’est dans cette cacophonie générale qu’on avait tenté d’expliquer au
frère nos préoccupations et nos craintes. Je ne sais plus ce qui
s’est passé, si la sonnette de la fin des cours avait retenti, mais
tout avait été arrêté. Certains externes étaient partis, d’autres
étaient restés avec une poignée d’internes, nous étions un certain
nombre d’élèves en classe à discuter de la manière avec la quelle
nous allions éjecter la prof, c’est alors que le frère était revenu
en classe, plus calme cette foi. On lui avait ré expliqué notre
situation, il avait compris nos craintes mais il nous avait signalé
que la prof nous avait tous collé. Pour nous c’était simple, nous ne
ferions pas la colle et nous allions demander de l’aide aux
professeurs d’atelier pour savoir quels étaient les cours de maths et
de sciences que nous devions apprendre pour nous servir des machines
car l’examen final était pour l’année suivante.
Si je me souviens bien, les professeurs des ateliers mécanique
générale et mécanique automobile nous avaient proposé de voir et
revoir les principales opérations sur papier et ensuite en calcul
mental pour trouver rapidement les vitesses de rotation des machines
et des pièces, les rapports entre les différentes pignons pour les
calculs des avances sur les tours avec la vis mère, les vitesses et
avances sur les fraiseuses, étaux-limeurs, perceuses, etc. Le cours
de math suivant avait commencé par une mise au point avant l’arrivée
de la prof. La prof était arrivée avec le frère. Les délégués de
classe avaient commencé leurs explications sur les cours à suivre
suivant les conseils des professeurs des ateliers pour l’utilisation
des machines outils, mais également dans le domaine électrique,
pneumatique et hydraulique. Si la prof acceptait de nous faire des
cours dans ce sens tout irait bien, néanmoins elle pouvait finir le
cours qui avait été commencé et que peu comprenait et on changerait
complètement de sujet d’étude, si elle refusait, on pouvait se passer
d’elle et on devenait autonome. On prenait un gros risque, car si
elle refusait, qui allait nous faire les cours ? Le frère nous avait
rappelé qu’à la fin d’année nous avions notre examen professionnel Ã
passer, ce n’était pas le moment de faire du zèle, même si certains
étudiants à Paris et dans d’autres villes étaient en guerre contre le
gouvernement, etc, etc. Je ne sais plus de ce qui s’est passé après,
mais la prof était restée et on avait commencé des cours qui étaient
en correspondance avec nos travaux en atelier. On a eu nos 2 heures
de colle. Seule une poignée d’élèves les avaient faites, les 3/ 4 des
autres avaient refusé et leurs noms avaient été inscrits au tableau
de la classe : j’y étais. Les délégués avaient effacé les noms car
ils n’étaient pas d’accord sur la punition. La prof n’avait rien dit.
Le prof de gym avait compris notre état d’excitation et nous faisait
réaliser des mouvements d’échauffement et d’assouplissement
musculaires autres que les éternelles courses et sauts. Nous avions
de l’énergie d’énervement à dépenser.
Apprentissage au tabac
Je ne sais plus si c’était en deuxième ou troisième année, mais un
hiver arrivait et j’allais encore avoir froid. Alors j’ai eu l’idée
de commencer à fumer des cigarettes. Ce n’était pas pour fumer, non,
c’était pour me réchauffer les mains. L’ennui était que, débutant
comme fumeur, les récréations n’étaient pas assez longues pour fumer
une cigarette dans sa totalité. Mes parents m’avaient mis en garde
contre les effets néfastes du tabac et c’est un de leur ami qui
m’avait indiqué un moyen très simple et pratique et moins nocif que
la cigarette pour me réchauffer les mains : fumer la pipe. La pipe ?
Oui ! Pourquoi pas, cela faisait un peu vieux jeu mais je m’en
moquais. On avait le droit le fumer derrière les barrières au fond de
la cour de récréation dans une zone sablée et gravillonnée. Je
bourrais le tabac dans la pipe, j’allumais et je me réchauffais les
mains comme cela. Je n’étais pas le seul à fumer. Par contre chacun
allumait son tabac avant le passage de la barrière, moi même je le
faisais et un surveillant nous guettait du coin de l’œil et on avait
droit à des pages d’écriture à faire comme punition, vu qu’on ne les
faisait pas, il nous collait pour la fin de semaine. Combien j’ai eu
d’heures de colle ? Je n’en sais plus rien, tout ce dont je me
souviens c’est que je n’en ai fait aucune. Le surveillant n’insistait
pas trop car il avait compris que l’on ne baissait plus la tête comme
des coupables. Une fois la cloche ou la sonnerie d’appelle
retentissait (je ne sais plus), je glissais ma pipe dans ma poche et
le tabac était tellement serré que la pipe s’étreignait toute seule
mais restait chaude. A la récréation suivante, je devais nettoyer le
filtre de la pipe avant une nouvelle utilisation.
Coupures de courant provoquées
Je ne sais plus quand, mais nous avions demandé à pouvoir travailler
à deux par table pour pouvoir faire des demandes et avoir des
réponses sur des sujets difficiles, ce qui était interdit en salle
d’étude ou il devait régner le silence. On avait donc demandé à avoir
des tables et bancs dans le couloir avec de l’éclairage. Tout avait
bien fonctionné durant quelques semaines jusqu’à ce que des doigts
enlèvent les ampoules. L’électricien de l’école ayant refusé de les
remplacer, chacun inventa un moyen pour faire revenir dans le
couloir. De mon côté, j’avais bricolé une prise mâle de rallonge
électrique en reliant les deux plots par un fil assez solide pour
résister au cours circuit qui allait suivre dans la prise. Au premier
essai, cela avait fait un bruit sec dans la fiche murale qui était
devenue noire et la prise que j’avais en main avait chauffé en une
fraction de seconde et mes doigts n’avaient pas appréciés la chaleur.
Le fusible avait sauté, j’avais atteint mon but. Aux actions
suivantes, j’avais enfermé la prise de courant dans un mouchoir et
là , je ne sentais plus rien. Ce qui fait l’électricien, un homme
ventru et solide de toute sa hauteur venait plusieurs fois par
semaine dans les couloirs avec une grande échelle en bois pour
remplacer les fusibles grillés. Les fusibles étaient installés sous
le haut plafond du couloir, mais les ampoules n’ont jamais été
remises. On travaillait donc le soir à la lueur des tubes néon qui
pendaient du plafond dans le couloir.
Les cross
J’ai participé à deux courses de cross dans un stade sportif en
dehors de St Jo. A la première course, je me suis perdu dans le
circuit et la deuxième, je suis allé aux toilettes du stade pendant
que les autres courraient. Après avoir pris tout mon temps, j’ai
enlevé mon numéro épinglé sur ma tenue de gym, je suis ressorti en
dehors du stade et je suis revenu à ma place sur les gradins ou
m’attendaient les copains.
La colère gronde dans le pays
J’ai assisté à la colère des gens en ville avec des bandes de jeunes
et d’adultes qui manifestaient dans les rues, et l’angoisse des vieux
à la campagne. Au village, les habitants commençaient à être
inquiet : des camions d’approvisionnement roulaient difficilement,
les prix augmentaient, des transports publics organisaient des
grèves, hommes et femmes âgées étaient dans les jardins potagers du
matin au soir. Les vieux qui avaient survécus à la dernière invasion
Allemande avaient l’habitude aux restrictions. Nous, beaucoup moins !
Décembre 1967
L’hiver commençait à être froid et brûlant à la foi : froid par la
météo, mais chaud d’autre part, car les grèves commençaient à éclater
un peu partout dans le pays. Dans les villes, étudiants, ouvriers et
certains fonctionnaires avaient envahi des bâtiments, d’autres
bloquaient des routes, etc. Vu que l’approvisionnement dans les
entreprises fonctionnait de moins en moins, des patrons d’usines
menaçaient de fermeture. A la campagne, des classes étaient fermées,
un service d’accueil était organisé par ce que l’on appel maintenant
des bénévoles. Quand je partais le lundi matin du village pour aller
à St Jo, personne ne pouvait prévoir si j’allais arriver en gare Ã
Dijon. La même chose pour le samedi midi pour le retour au village.
Je me souviens qu’un samedi un conducteur n’était plus d’accord pour
conduire la loco et au bout de plusieurs heures de négociations,
c’est un autre conducteur qui avait pris sa place. J’étais arrivé Ã
la maison assez tard dans l’après midi. Puis, seuls les trains de
marchandises et les trains ouvriers circulaient, les autres étaient Ã
l’arrêt. Puis, des trains de marchandises ont commencé à avoir des
difficultés pour circuler. Les réserves dans les stations d’essence
diminuaient, le pétrole commençait à manquer. Le pays était en
crise : le printemps 1968 arrivait…….
Certains français avaient cru, en automne 1967, que toute cette
agitation allait être résorbée assez rapidement. Ils avaient donc
réservé leurs congés pour l’été 68. Le gouvernement l’avait-il
compris ? En fin juin 1968, des promesses gouvernementales arrivèrent
pour calmer l’excitation générale et débloquer la situation dans le
pays. C’est ainsi que des français réussirent à partir en vacances en
été, mais au lieu de partir un mois comme prévu, les vacanciers que
j’ai connu ne sont partis qu’au vu de l’acompte payé lors leurs
réservations. Au retour des vacanciers, la crise, plus calme, était
toujours là . J’ai quitté St Jo en juin 68 après l’examen final qui
c’est déroulé dans la tourmente d’un pays en ébullition. A la
campagne, les bouleversements durèrent jusqu’en 1969/70.