l'hiver a St Jo
Mon premier hiver à St Jo
Les lundis se sont succédés avec des départs accompagnés de regrets
lorsque je voyais le dernier bâtiment de mon village disparaître de
mes yeux alors qu’étais dans le train qui m’emmenait à Dijon. Oui, la
voie ferrée a été creusée dans des vallons, ce qui a provoqué des
tranchées de plus de 10 mètres de hauteurs par endroits et que petit
à petit mon village disparaissait. Je devais attendre le samedi en
début d’après midi pour revoir une ferme construite au milieu des
champs qui m’annonçait le retour à la maison. Mais un lundi matin, de
retour à St Jo, je me souviens avoir senti comme une odeur de
roussi : la salle des fêtes avait brûlé durant une fin de semaine.
C’est là que j’ai appris qu’en plus de réunir des élèves chaque fin
de mois, cette salle des fêtes servait de lieu de répétitions pour un
orchestre et une chorale. Des centaines de partitions musicales
étaient parties en fumée. Il ne restait plus grand-chose du bâtiment.
Les musiciens et les choristes se sont retrouvés dans une salle qui
communiquait avec les réfectoires, sous la chapelle.
Je me souviens qu’un jour le professeur de gymnastique avait essayé
de nous faire marcher au pas, comme des soldats. La seule chose qu’il
avait oublié c’est que, dans la classe de mécanique, le plus petit
devait faire un mètre quarante et le plus grand un mètre quatre
vingt : alors, synchroniser des mouvements de pas quand les enjambées
ne sont pas les mêmes…Le professeur n’avait pas insisté.
Et quand avait décidé de nous faire courir au parc de la Colombière !
Là , c était vraiment génial. Je quittais St Jo et je prenais durant
quelques minutes le trajet pour aller en gare, mais sur la première
place on tournait sur la droite en direction de l’avenue du Parc. En
rang par deux, plus ou moins bien formé on marchait tout le long de
cette avenue qui n’en finissait pas en longueur. Le parc était fermé
par un mur de plusieurs centaines de mètres de long pour arriver
devant une belle et large entrée en fer forgé. La première fois que
je suis rentré dans se parc, il m’a paru immense. L’environnement
m’avait rappelé mon village, sauf que le parc était beaucoup mieux
aménagé avec de grandes allées toutes droites et bien entretenues.
Quand on arrivait dans un endroit choisi par le professeur et on
avait quelques minutes pour se changer en plein air. Puis il nous
expliquait le circuit à faire et on courrait. De temps en temps on
croisait des marcheurs, des faneurs ou visiteurs qui nous regardaient
courir. A l’arrivée de la course, j’étais crotté, fatigué, usé. Comme
les copains je me changeais sur place. Le plus dure restait à faire :
revenir à St Jo. A mon premier retour, cette avenue du Parc m’a paru
plus longue au retour qu’au départ. C’est là que je me suis promis
que pour la prochaine course au parc de la Colombière, je n’y
mettrais pas toute mon énergie, mais je garderais un peu de force
pour le trajet du retour.
Les mois ont passé et l’hiver est arrivé.
Les samedis en début d’après midi, en gare de Dijon Porte Neuve, il
n’était plus question d’attendre le train en haut du mur,
construction colossale qui est un des vestiges des anciens remparts
des fortifications de la ville de Dijon. Les élèves et les autres
passagers, nous attendions sagement dans la salle d’attente jusqu’Ã
ce qu’un préposé du chemin de fer signale que le train arrivait. Là ,
tout le monde sortait de la gare et grimpait les escaliers. Arrivé au
dessus, on voyait rapidement les toits enneigés de Dijon. Tout était
beau et froid. Le vent cinglait nos visages. LÃ , malheur aux jeunes
qui avaient un bonnet sur la tête. Il y avait toujours un grand pour
enlever le bonnet de la tête d’un plus petit. Le bonnet était envoyé
par dessus la balustrade, du haut des remparts, et s’envolait au
vent. Combien j’en ai perdu de ces bonnets de laine…jusqu’au jour
j’ai eu une capuche fixée au vêtement chaud, vêtement dont j’ai
oublié le nom (il y a 40 ans, l’appellation « anorak » ou « parka »
n’existait pas). On avait hâte de monter dans un wagon pour être Ã
l’abri.
Au village, lorsque le froid arrivait avec la neige, l’école était
chauffée avec des fourneaux à bois charbon qui était installé au
milieu des classes. Le seul inconvénient, si je me souviens bien, on
ouvrait souvent les fenêtres quelques instants pour aérer.
A la maison, au rez-de-chaussée de l’ancienne ferme, mes grands
parents se chauffaient avec une cuisinière à bois qui chauffait la
cuisine et la salle à manger. Les autres pièces étaient chauffées par
une cheminée installée dans la chambre de mes grands parents. La
cheminée fut remplacée par un radiateur électrique. A l’étage, mon
père avait installé un poël à bois charbon à feu continu à un endroit
stratégique, ainsi, toute la maison était chauffée à condition de
laisser les portes ouvertes.
A St Jo, j’ai découvert le système du chauffage central à radiateur Ã
eau chaude. Dans le dortoir, la consigne était simple, on devait
purger les radiateurs tous les soirs. C’était à celui qui était le
plus proche d’un radiateur d’en avoir la charge. Ce n’était pas mon
cas, mais pourtant un interne m’avait demandé de le faire. Purger un
radiateur ? C’est quoi purger un radiateur ? J’ai donc appris à purger.
Tout ce dont je me souviens, c’est que mon premier hiver à St Jo a
été froid.
Les vacances de Noël arrivaient. Vu que l’on venait me chercher en
voiture, ma mère m’avait demandé de ramener un maximum d’affaires.
J’avais donc ma petite valise et un gros sac. Les fêtes de fin
d’années étaient toujours enneigées dans ces années-là , un peu comme
cette année. Durant ces temps de vacances, la maisonnée était
complète avec mon frère et mes deux soeurs. C’est à cette occasion,
qu’au rez-de-chaussée, ma grand-mère sortait les grands plats pour
faire à manger à tout ce petit monde, et ça sentait bon. On rentrait
par la cuisine pour ensuite aller dans la salle à manger séparée par
une petite cloison donc la porte était toujours ouverte. Là , tout
chacun exposait ses problèmes, joies et peines. Je me souviens que
lorsque mon grand frère, qui faisait ces études en Saône et Loire a
parlé de ces recherches technologiques, il avait parlé de fusion de
l’acier par rotation à grande vitesse et moi je me souviens d’avoir
appelé cette méthode par « courant de Foucault ». Tous ont été
surpris de constater que j’avais une certaine connaissance qui
n’était pas de mon niveau scolaire. J’en avais profité pour montrer
mes cours à mon grand frère sous les yeux un peu déçus de mes
parents. Mon grand frère examina mes cours. Sa conclusion tomba comme
un couperet : mes cours étaient du niveau de la seconde et non de la
4 ème. Je ne sais plus ce qui c’est passé après.
Bataille de boules de neige.
Au village, on avait le droit aux batailles de boules de neige
pendant les récréations. L’instituteur faisait deux traces dans la
cour rectangulaire enneigée. On n’avait pas le droit de dépasser les
lignes tracées dans la neige. Les boules étaient lancées avec énergie
mais peu atteignaient leur but car la distance était suffisamment
grande entre les deux équipes, ainsi, aucun élève n’était ni touché,
ni blessé. Et oui, la neige bien tassée, en pleine figure ça fait
mal. Les boules éclataient à nos pieds. Certaines boules s’écrasaient
contre un des murs qui entouraient la cour. D’autres élèves avaient
une technique particulière pour lancer les boules de neige : si je me
souviens bien, ils tournaient sur eux-mêmes comme pour le lancé du
marteau en athlétisme, ce qui devait amplifier la puissance du jet
par rapport au lancé directe, mais les trois quart du temps, les
boules de neiges arrivaient là ou on ne les attendaient pas. Quand on
dépassait les lignes tracées dans la neige, on avait droit au rappel
à l’ordre de l’instituteur.
Il y avait également des sorties avec les professeurs, les élèves et
des parents pour aller glisser sur la neige avec une luge ou un
traîneau au dessus d’un monticule naturel qui surplombe le village du
haut de ces 300 mètres. Le Mont de Marcilly (tel est son nom) est la
fierté du village. Pour la petite histoire, des archéologues ont
trouvé des vestiges qui datent des années où le pays était romain !
Dans les temps de ma jeunesse, ce sont 200 personnes qui glissaient
sur les pentes de ce Mont. On s’amusait bien.
A St Jo : pas de bataille de boules de neige ! Pourtant si je me
souviens bien, de temps en temps, des objets blancs volaient dans les
aires, mais c’était rare : attention surveillants nous guettaient du
coin de l’œil. Pour le reste de mon premier hiver à St Jo, je ne me
souviens de quelques détailles comme l’eau des urinoirs, sous le
préau, qui était gelée, qu’il y avait des poutres en bois dans la
piscine et que j’ai eu froid.
Les lundis se sont succédés avec des départs accompagnés de regrets
lorsque je voyais le dernier bâtiment de mon village disparaître de
mes yeux alors qu’étais dans le train qui m’emmenait à Dijon. Oui, la
voie ferrée a été creusée dans des vallons, ce qui a provoqué des
tranchées de plus de 10 mètres de hauteurs par endroits et que petit
à petit mon village disparaissait. Je devais attendre le samedi en
début d’après midi pour revoir une ferme construite au milieu des
champs qui m’annonçait le retour à la maison. Mais un lundi matin, de
retour à St Jo, je me souviens avoir senti comme une odeur de
roussi : la salle des fêtes avait brûlé durant une fin de semaine.
C’est là que j’ai appris qu’en plus de réunir des élèves chaque fin
de mois, cette salle des fêtes servait de lieu de répétitions pour un
orchestre et une chorale. Des centaines de partitions musicales
étaient parties en fumée. Il ne restait plus grand-chose du bâtiment.
Les musiciens et les choristes se sont retrouvés dans une salle qui
communiquait avec les réfectoires, sous la chapelle.
Je me souviens qu’un jour le professeur de gymnastique avait essayé
de nous faire marcher au pas, comme des soldats. La seule chose qu’il
avait oublié c’est que, dans la classe de mécanique, le plus petit
devait faire un mètre quarante et le plus grand un mètre quatre
vingt : alors, synchroniser des mouvements de pas quand les enjambées
ne sont pas les mêmes…Le professeur n’avait pas insisté.
Et quand avait décidé de nous faire courir au parc de la Colombière !
Là , c était vraiment génial. Je quittais St Jo et je prenais durant
quelques minutes le trajet pour aller en gare, mais sur la première
place on tournait sur la droite en direction de l’avenue du Parc. En
rang par deux, plus ou moins bien formé on marchait tout le long de
cette avenue qui n’en finissait pas en longueur. Le parc était fermé
par un mur de plusieurs centaines de mètres de long pour arriver
devant une belle et large entrée en fer forgé. La première fois que
je suis rentré dans se parc, il m’a paru immense. L’environnement
m’avait rappelé mon village, sauf que le parc était beaucoup mieux
aménagé avec de grandes allées toutes droites et bien entretenues.
Quand on arrivait dans un endroit choisi par le professeur et on
avait quelques minutes pour se changer en plein air. Puis il nous
expliquait le circuit à faire et on courrait. De temps en temps on
croisait des marcheurs, des faneurs ou visiteurs qui nous regardaient
courir. A l’arrivée de la course, j’étais crotté, fatigué, usé. Comme
les copains je me changeais sur place. Le plus dure restait à faire :
revenir à St Jo. A mon premier retour, cette avenue du Parc m’a paru
plus longue au retour qu’au départ. C’est là que je me suis promis
que pour la prochaine course au parc de la Colombière, je n’y
mettrais pas toute mon énergie, mais je garderais un peu de force
pour le trajet du retour.
Les mois ont passé et l’hiver est arrivé.
Les samedis en début d’après midi, en gare de Dijon Porte Neuve, il
n’était plus question d’attendre le train en haut du mur,
construction colossale qui est un des vestiges des anciens remparts
des fortifications de la ville de Dijon. Les élèves et les autres
passagers, nous attendions sagement dans la salle d’attente jusqu’Ã
ce qu’un préposé du chemin de fer signale que le train arrivait. Là ,
tout le monde sortait de la gare et grimpait les escaliers. Arrivé au
dessus, on voyait rapidement les toits enneigés de Dijon. Tout était
beau et froid. Le vent cinglait nos visages. LÃ , malheur aux jeunes
qui avaient un bonnet sur la tête. Il y avait toujours un grand pour
enlever le bonnet de la tête d’un plus petit. Le bonnet était envoyé
par dessus la balustrade, du haut des remparts, et s’envolait au
vent. Combien j’en ai perdu de ces bonnets de laine…jusqu’au jour
j’ai eu une capuche fixée au vêtement chaud, vêtement dont j’ai
oublié le nom (il y a 40 ans, l’appellation « anorak » ou « parka »
n’existait pas). On avait hâte de monter dans un wagon pour être Ã
l’abri.
Au village, lorsque le froid arrivait avec la neige, l’école était
chauffée avec des fourneaux à bois charbon qui était installé au
milieu des classes. Le seul inconvénient, si je me souviens bien, on
ouvrait souvent les fenêtres quelques instants pour aérer.
A la maison, au rez-de-chaussée de l’ancienne ferme, mes grands
parents se chauffaient avec une cuisinière à bois qui chauffait la
cuisine et la salle à manger. Les autres pièces étaient chauffées par
une cheminée installée dans la chambre de mes grands parents. La
cheminée fut remplacée par un radiateur électrique. A l’étage, mon
père avait installé un poël à bois charbon à feu continu à un endroit
stratégique, ainsi, toute la maison était chauffée à condition de
laisser les portes ouvertes.
A St Jo, j’ai découvert le système du chauffage central à radiateur Ã
eau chaude. Dans le dortoir, la consigne était simple, on devait
purger les radiateurs tous les soirs. C’était à celui qui était le
plus proche d’un radiateur d’en avoir la charge. Ce n’était pas mon
cas, mais pourtant un interne m’avait demandé de le faire. Purger un
radiateur ? C’est quoi purger un radiateur ? J’ai donc appris à purger.
Tout ce dont je me souviens, c’est que mon premier hiver à St Jo a
été froid.
Les vacances de Noël arrivaient. Vu que l’on venait me chercher en
voiture, ma mère m’avait demandé de ramener un maximum d’affaires.
J’avais donc ma petite valise et un gros sac. Les fêtes de fin
d’années étaient toujours enneigées dans ces années-là , un peu comme
cette année. Durant ces temps de vacances, la maisonnée était
complète avec mon frère et mes deux soeurs. C’est à cette occasion,
qu’au rez-de-chaussée, ma grand-mère sortait les grands plats pour
faire à manger à tout ce petit monde, et ça sentait bon. On rentrait
par la cuisine pour ensuite aller dans la salle à manger séparée par
une petite cloison donc la porte était toujours ouverte. Là , tout
chacun exposait ses problèmes, joies et peines. Je me souviens que
lorsque mon grand frère, qui faisait ces études en Saône et Loire a
parlé de ces recherches technologiques, il avait parlé de fusion de
l’acier par rotation à grande vitesse et moi je me souviens d’avoir
appelé cette méthode par « courant de Foucault ». Tous ont été
surpris de constater que j’avais une certaine connaissance qui
n’était pas de mon niveau scolaire. J’en avais profité pour montrer
mes cours à mon grand frère sous les yeux un peu déçus de mes
parents. Mon grand frère examina mes cours. Sa conclusion tomba comme
un couperet : mes cours étaient du niveau de la seconde et non de la
4 ème. Je ne sais plus ce qui c’est passé après.
Bataille de boules de neige.
Au village, on avait le droit aux batailles de boules de neige
pendant les récréations. L’instituteur faisait deux traces dans la
cour rectangulaire enneigée. On n’avait pas le droit de dépasser les
lignes tracées dans la neige. Les boules étaient lancées avec énergie
mais peu atteignaient leur but car la distance était suffisamment
grande entre les deux équipes, ainsi, aucun élève n’était ni touché,
ni blessé. Et oui, la neige bien tassée, en pleine figure ça fait
mal. Les boules éclataient à nos pieds. Certaines boules s’écrasaient
contre un des murs qui entouraient la cour. D’autres élèves avaient
une technique particulière pour lancer les boules de neige : si je me
souviens bien, ils tournaient sur eux-mêmes comme pour le lancé du
marteau en athlétisme, ce qui devait amplifier la puissance du jet
par rapport au lancé directe, mais les trois quart du temps, les
boules de neiges arrivaient là ou on ne les attendaient pas. Quand on
dépassait les lignes tracées dans la neige, on avait droit au rappel
à l’ordre de l’instituteur.
Il y avait également des sorties avec les professeurs, les élèves et
des parents pour aller glisser sur la neige avec une luge ou un
traîneau au dessus d’un monticule naturel qui surplombe le village du
haut de ces 300 mètres. Le Mont de Marcilly (tel est son nom) est la
fierté du village. Pour la petite histoire, des archéologues ont
trouvé des vestiges qui datent des années où le pays était romain !
Dans les temps de ma jeunesse, ce sont 200 personnes qui glissaient
sur les pentes de ce Mont. On s’amusait bien.
A St Jo : pas de bataille de boules de neige ! Pourtant si je me
souviens bien, de temps en temps, des objets blancs volaient dans les
aires, mais c’était rare : attention surveillants nous guettaient du
coin de l’œil. Pour le reste de mon premier hiver à St Jo, je ne me
souviens de quelques détailles comme l’eau des urinoirs, sous le
préau, qui était gelée, qu’il y avait des poutres en bois dans la
piscine et que j’ai eu froid.